Vernissage de l'exposition
dominique bulteau
"Je veux peindre au quotidien le quotidien de la peinture.
Le philosophe Clément Rosset écrit que le réel, c’est ce qui n’a pas de double et je crois en effet que le tableau est un monde clos qui se suffit à lui-même comme
un corps mort. Le tableau est une réalité autonome et le spectateur est une autre réalité séparée du tableau.
Faire exposition de tableaux toujours déjà anciens, c’est montrer ses peaux mortes. Chaque tableau restant en arrière du prochain en manière de mue animale. Le
peintre est une sorte de homard. Ainsi moi, j’essaie de rentrer dans la peinture et quand le travail est terminé, il y a le tableau et moi je suis déjà loin.
Peindre, c’est conquérir un territoire. Et il arrive le moment où dans le travail de la peinture quelque chose paraît se figer en tableau. La peinture semble
prendre la pose. Si comme l’écrit Heidegger : « La pensée est d’essence provisoire », il en va de même avec la peinture. Si il y a un impensé de la pensée, il y a dans la peinture, c’est à dire
dans l’action de peindre, un impossible du peindre ou un impossible à peindre. Il y a comme une logique de la déception, quelque chose que le pinceau n’est pas parvenu à toucher. C’est cela qui
constitue l’in-fini du tableau, son interminable suspension et selon l’expression blanchotienne quelque chose de son « ressassement éternel ». On peut dire que le tableau, c’est le fantôme de la
peinture. Il n’a pas de devenir. Seulement, il porte son passé en sa présence mais il n’est pas une preuve. Il ne dit rien de l’expérience intime vécue dans l’atelier et je me dis parfois que la
peinture n’est peut-être pas un art du visible.
Je m’intéresse à la question du genre en peinture et j’avais pensé pour cette exposition travailler sur un genre tout à fait démodé qu’est la peinture d’histoire
mais ça a fait des histoires, toutes petites. C’est un genre assez compliqué quand on souhaite comme c’est mon cas limiter le plus possible les effets de narration. Je sais bien qu’on n’échappe
pas aux impressions comiques ou tragiques que produit le pinceau sur la toile. La peinture, c’est quand même une histoire de coups de pinceau comme la philosophie est affaire de coups de marteau.
Mais enfin, je suis le pinceau et comme dirait Prévert, si je suis le pinceau, c’est que je ne suis pas moi et c’est peut-être cela qu’il faut être. Être sans soi et peindre à l’aveugle ou à la
mort parce-qu’enfin pour faire un tableau, il faut savoir renoncer à soi, s’évanouir dans le tableau et perdre connaissance.
Manet peignait pour savoir ce qui se passait dans la tête de Vélasquez. Picasso dans la tête de Cézanne et dans la culotte de Degas. Moi, je peins pour savoir ce
qu’il y a dans une tête vide."
dominique bulteau - mai 2013
GALERIE SUR COUR
en partenariat avec
le Ville de Saint-Hilaire-de-Riez
du 3 au 29 juin 2013
Salle Henry-Simon - Office de tourisme
Place Gaston-Pateau
85270 Saint-Hilaire-de-Riez
du lundi au samedi, 9h/12h30 et 14h/18h30